Ce que la crise du Covid-19 révèle de nos systèmes alimentaires

La crise que nous traversons actuellement à l’échelle mondiale semble bousculer nos priorités : recentrés sur la nécessité de s’alimenter et de préserver notre santé, nous sommes ramenés à des considérations de survie qui sont habituellement diluées dans nos vies quotidiennes. La question reste de savoir si cette crise temporaire peut changer durablement nos regards sur nos système alimentaires, et si nous sommes capables de progresser vers une production agricole plus locale, plus saine et plus juste.

L’agriculture locale et les circuits courts sous le feu des projecteurs

L’enquête « Manger au temps du coronavirus » menée par Terralim depuis le début du confinement et dont le premier bulletin de partage vient de paraître montre que la crise du Covid-19 modifie sensiblement nos comportements alimentaires : recours massif aux livraisons, accumulation de denrées non périssables… Dans ce contexte, les circuits courts sont plébiscités pour leur capacité d’adaptation, mais aussi pour le maintien du lien social qu’ils permettent. Il est encore trop tôt pour avoir des chiffres précis sur la vente de produits alimentaires en direct chez les agriculteurs et via les circuits de proximité en cette période si spéciale, mais il est très probable qu’elle représente bien plus que les 6 à 7% habituels de notre consommation.

Pour répondre à la fois aux demandes des consommateurs et des agriculteurs, certaines collectivités territoriales ont même décidé de proposer des solutions innovantes. Des plateformes permettent ainsi de mettre en relation les producteurs avec des livreurs, ou bien des commerçants en ville qui souhaitent devenir des points de distribution temporaires : c’est le principe de l’initiative « Adopte un maraîcher » qui est née à Angers et est maintenant répliquée dans plusieurs villes de France. Un collectif de journalistes a créé une carte collaborative des circuits courts pour faire connaître toutes ces démarches qui émergent depuis la mise en place du confinement.

Cette dynamique de collaboration entre producteurs, acteurs de la distribution, de l’économie sociale et solidaire et collectivités territoriales montre à quel point il est pertinent de penser l’approvisionnement à l’échelle du bassin de vie. Hors contexte de crise, la mise en place de Projets Alimentaires Territoriaux (PAT) promeut depuis 2014 cette collaboration des entités d’un même territoire pour mieux penser les intérêts économiques, environnementaux et sociaux d’une boucle alimentaire en circuit court qui lie les villes et leurs périphéries.

Vers une modification durable des liens villes/campagnes ?

Suite à l’appel lancé par le gouvernement fin mars, des milliers de volontaires se sont mobilisés pour prêter main forte aux agriculteurs ayant besoin d’aide pour leur cultures. La campagne « Des bras pour ton assiette » de la plateforme WiziFarm a ainsi recueilli 145 000 demandes quelques jours seulement après son lancement. Privés de leurs activités habituelles, les citadins souhaitent se rendre utiles et retourner au travail de la terre. Faut-il voir en cette crise la possibilité de revaloriser enfin socialement et économiquement les métiers agricoles ? La sécurité alimentaire et la consolidation de notre système d’approvisionnement en produits frais, sains et à prix juste seront certainement au cœur des sujets de société de ces prochaines années. Mais encore faut-il donner aux agriculteurs les moyens de produire dans le respect de la biodiversité et de l’environnement, au risque de continuer à encourager des exploitations monospécifiques et d’élevage intensif qui contribuent au risque épidémique.

Le modèle agricole majoritaire que nous connaissons actuellement participe malheureusement à la propagation rapide des épidémies. D’une part, nos habitudes alimentaires toujours plus carnivores incitent à l’extension immodérée des élevages, et donc à la déforestation des milieux naturels pour les implanter. C’est par ce biais que des animaux forestiers (tels que les chauves-souris) se retrouvent en contact avec des espèces domestiques (cochons, bovins, ovins, volaille) qui deviennent potentiellement les hôtes intermédiaires de virus jusqu’à présent inconnus. Les éleveurs et les consommateurs de ces animaux se retrouvent ensuite infectés et l’épidémie se diffuse chez l’humain. D’autre part, pour atteindre des objectifs de rendement économique qui permettent aux producteurs de survivre, les élevages et les cultures sont de plus en plus monospécifiques. C’est-à-dire que la diversité des espèces que l’on trouve dans une ferme diversifiée traditionnelle est troquée contre la production d’une seule espèce à fort rendement (qu’il s’agisse d’une céréale ou d’un animal, la logique est la même). Cette stratégie permet malheureusement au virus ou à la maladie de se développer rapidement au sein du cheptel, là où la diversité de l’exploitation aurait pu limiter la propagation du virus, faute d’espèces hôtes à contaminer.

Actuellement, la mise en place d’exploitations diversifiées, de petite taille et biologiques est difficile pour les agriculteurs. La crise écologique et sanitaire que nous traversons devrait pourtant nous convaincre de changer nos modèles agricoles, et vite. Pour cela, il est indispensable de penser les systèmes alimentaires de façon plus globale, et de reconnecter les habitudes alimentaires avec leurs modes de production.

Les bienfaits de l’agriculture urbaine encore démontrés

Une autre façon de rendre notre système alimentaire plus résilient, c’est-à-dire davantage capable de résister aux aléas, est de permettre à toutes et tous de produire une partie de son alimentation. Pour beaucoup, un petit potager dans le jardin le permet. Mais pour les citadins, la question est plus difficile à résoudre, faute d’espace. L’agriculture urbaine connaît un intérêt croissant des collectivités françaises depuis une dizaine d’années, mais la proportion de citadins en mesure de produire quelques fruits et légumes reste encore trop anecdotique. A Montréal, où 15 000 personnes s’investissent dans les jardins communautaires, on considère que ceux-ci contribuent de façon importante à la sécurité alimentaire des ménages. Le travail mené dans les villes en crise après l’effondrement économique de 2008 montre également que l’auto-production alimentaire est un gage de survie des populations vulnérables.

Agriculture urbaine à Montréal © Lisa Bertrand

Aux côtés de ses bienfaits environnementaux et sociaux, le développement de l’agriculture urbaine devient aujourd’hui un gage de la capacité des villes à affronter des grandes périodes de difficultés de production et de distribution alimentaire. Il faudra attendre la sortie de la crise du Covid-19 pour continuer à implanter des espaces d’agriculture urbaine dans les villes, plus que jamais nécessaires pour affronter les défis à venir.

L’agriculture urbaine et les défis de la justice alimentaire : quelle méthode de travail pour les collectivités ?

Les recherches en sciences sociales s’intéressent aujourd’hui à l’agriculture urbaine et à ses effets sur la ville et les citadins. L’une des grandes questions posées par ces travaux est celle de la justice alimentaire : est-ce que l’agriculture urbaine contribue à donner aux individus, quelle que soit leur provenance sociale, le droit de produire, de transformer et de consommer une nourriture saine et bonne ? Si oui, comment les collectivités peuvent-elles utiliser l’agriculture urbaine aux côtés de leurs outils actuels (Plans Alimentaires Territoriaux, etc.) pour garantir une meilleure alimentation pour toutes et tous ?

Cet article relaye notamment les conclusions d’un excellent papier rédigé par les chercheurs américains Megan Horst, Nathan McClintock et Lesli Hoey à ce sujet et qui passe en revue les résultats de toutes les études américaines menées jusqu’à présent sur le lien entre agriculture urbaine et justice alimentaire. Ce travail concerne le contexte nord-américain, mais la plupart des constats des chercheurs sont applicables aux problématiques françaises et européennes.

L’agriculture urbaine et la promesse de manger sain et local

Après avoir écarté le maraîchage des centres-villes puis des ceintures périurbaines, réimplanter l’alimentaire au cœur de la ville fait aujourd’hui sens dans la perspective de manger local et promouvoir les circuits courts. D’un point de vue purement logistique et économique, rapprocher le producteur du consommateur est en effet facilement défendable. Un maraîcher qui s’installe sur les toits d’un immeuble en pleine ville peut ensuite vendre directement sa production au voisinage que ce soit aux particuliers, aux restaurants, à la restauration collective…

Mais qui dit proximité géographique ne dit pas nécessairement accessibilité économique, car tout dépend du prix d’achat : bien que produits à proximité, les fruits et légumes ne seront pas forcément abordables pour toutes les bourses. Cela dépend du projet, du mode de production et de l’objectif du producteur.

Le vrai moyen d’agir en faveur la justice alimentaire avec l’agriculture urbaine, c’est donc de donner la possibilité à toutes les communautés, en particulier les plus précaires, de produire leurs propres aliments. Si le consommateur devient lui-même producteur de son alimentation, on voit que les bénéfices se démultiplient.

D’abord, avoir la possibilité de pouvoir produire soi-même ses fruits et légumes frais contribue de fait à une meilleure justice alimentaire : dans une ville comme Seattle, les citadins qui pratiquent l’agriculture urbaine produisent 30 à 40% de leurs besoins. Cette proportion non négligeable permet aussi aux individus issus de minorités ethniques de cultiver des variétés qu’ils ne pourraient pas trouver à l’achat en grandes surfaces. On retrouve souvent dans les jardins des variétés spécifiques de choux, piments ou légumes-racines qui ne sont pas forcément produites en quantité mais qui ont une valeur symbolique importante. Les travaux menés par Damien Deville montrent également que la production alimentaire en ville permet de survivre dans un contexte de villes en crise : on connaît bien l’exemple de Détroit aux Etats-Unis, mais on peut aussi le constater pour des villes européennes comme Porto ou Alès.

D’autre part, le jardinage a de nombreux effets bénéfiques sur la santé, qu’ils soient directs (activité physique, réduction du stress) ou indirects (réflexion sur la nutrition, évolution du régime alimentaire). Les populations les plus défavorisées étant les plus susceptibles de contracter des maladies liées à la précarité des modes de vie (obésité, diabète), ce volet n’est pas à sous-estimer.

Enfin, les jardins urbains constituent des espaces de lien social intéressants et permettent de développer l’action solidaire : j’avais consacré un article détaillé au sujet de la mixité sociale dans les projets d’agriculture urbaine.

Freins et points de vigilance

L’agriculture urbaine semble donc être un moyen facilement mobilisable pour atteindre l’objectif d’une meilleure justice alimentaire : il suffirait d’aménager des espaces partout dans la ville pour permettre aux uns et aux autres de cultiver leurs fruits et légumes. Mais la réponse à apporter est plus nuancée, car les politiques de développement de l’agriculture urbaine présentent des dérives qu’il faut avoir en tête.

Les chercheurs M. Horst, N. McClintock et L. Hoey font d’abord remarquer que les populations les plus défavorisées, celles qui auraient donc le plus besoin d’accéder à des espaces d’agriculture urbaine pour leur propre subsistance, sont les moins disposées à avoir du temps à y consacrer. Qu’il s’agisse de familles nombreuses, monoparentales ou que leur état de précarité les oblige à cumuler plusieurs emplois, le résultat est le même : ce ne sont pas des contextes qui permettent de consacrer du temps à l’entretien d’un potager.

Les trois chercheurs constatent également que les espaces et les dynamiques d’agriculture urbaine sont rapidement investis par des communautés dites dominantes, blanches et aisées. Ils regrettent d’abord que les emplacements choisis par les aménageurs pour implanter des jardins partagés se trouvent souvent dans des quartiers favorisés plutôt qu’à proximité de grands ensembles, par exemple. Et même lorsque l’emplacement permet l’émergence d’une certaine mixité sociale au sein du jardin partagé, ils constatent que les bureaux des associations qui se constituent autour des projets d’agriculture urbaine sont essentiellement composés de personnes issues des classes dominantes et bénéficient d’un bagage culturel supérieur (connaissance des administrations, du milieu associatif, ayant fait des études universitaires…). L’enjeu est fort aux Etats-Unis puisque les mouvements historiques d’agriculture urbaine ont été portés par les communautés noires et sud-américaines qui se retrouvent aujourd’hui éclipsées par des organisations majoritairement blanches, comme c’est par exemple le cas à Seattle.

Quelle marge de manœuvre pour les collectivités ?

Pour saisir l’opportunité de faire de l’agriculture urbaine un vecteur de justice alimentaire et éviter ces écueils, les auteurs proposent plusieurs pistes de travail à destination des pouvoirs publics. On peut aisément les transposer au contexte français, et en particulier aux collectivités territoriales.

Les premiers conseils donnés par les auteurs à destination des pouvoirs publics concernent la méthode de travail : pour travailler efficacement sur la question de l’agriculture urbaine et favoriser la justice alimentaire, il faut d’abord définir des objectifs clairs et un échéancier qui permettent ensuite de dérouler un plan d’actions à l’échelle du territoire. Il est ajouté que pour mener à bien ce programme, du personnel dédié et à temps plein doit être mis à disposition. Afin de promouvoir les communautés locales, il est également proposé de nommer un comité de pilotage des actions locales en faveur de l’agriculture urbaine, qui comprendrait notamment des représentants d’associations qui connaissent le quartier et les besoins des habitants et qui seraient amenés à valider ou invalider les actions de la collectivité.

En ce qui concerne les terrains mis à disposition, il est nécessaire de faire un inventaire des espaces disponibles et le choix des emplacements doit avant tout cibler les quartiers défavorisés. Les auteurs insistent également sur l’importance de choisir des lieux qui ne seront pas aménagés mais qui pourront rester des espaces sanctuarisés d’agriculture urbaine. L’exemple de la ville de Cleveland est en cela édifiant : depuis 2007, aucun jardin ne peut être aménagé sans faire l’objet d’une décision publique, avec un vote des habitants.

Enfin, les auteurs parlent de l’usage de l’equity lens (littéralement « lentille d’équité » ou « lunettes d’équité ») pour la collectivité. Cela signifie que les personnes en charge de la mise en oeuvre du plan d’action doivent faire l’exercice de ré-envisager chaque action du point de vue des minorités sociales : à qui cette action profite-t-elle vraiment ? Comment faire en sorte qu’elle participe à une meilleure justice alimentaire ? Au-delà de cette proposition formulée par les auteurs, on peut retenir que le travail collaboratif avec tous les services de la collectivité d’une part (y compris ceux de la citoyenneté, de la médiation, etc.) et avec les habitants d’autre part (via les associations locales et les réunions publiques) doivent permettre aux chargés de projets d’agriculture urbaine dans les collectivités de repenser leurs actions.

Il s’agit bien de mettre les communautés locales au cœur du processus de décision : cette méthode de travail est plus longue et plus difficile pour les administrations, mais c’est la seule viable pour accéder à une meilleure justice alimentaire sur leurs territoires.

La multiplication des ruches en ville favorise-t-elle vraiment la biodiversité ?

On assiste depuis quelques années à un engouement sans précédent pour l’installation de ruches en ville, chez les particuliers mais aussi sur les toits des équipements publics et des entreprises. Les articles de presse contant les bienfaits de l’apiculture urbaine et la qualité du miel produit en ville se multiplient, et pour cause : les villes ayant aujourd’hui interdiction d’utiliser des produits phytosanitaires sur les espaces publics, elles se révèlent être des espaces favorables à l’accueil des abeilles domestiques. A cela s’ajoute la diversité des plantes mellifères à la fois dans les parcs et jardins et sur les balcons fleuris qui permet d’obtenir un miel particulièrement riche.

Installer des ruches comme contribution à la préservation de l’environnement

L’enthousiasme des citadins pour l’apiculture part d’une bonne intention. Le grand public est de plus en plus informé de la disparition des abeilles qui souffrent de l’usage des pesticides par les agriculteurs dans nos campagnes, et dont les populations continuent de chuter dramatiquement. Pourtant les pollinisateurs tels que les abeilles jouent un rôle majeur dans la bonne marche des écosystèmes et de nos modes de production alimentaire : 35% de la quantité mondiale de nourriture dépend directement des pollinisateurs. 

Face à la disparition des abeilles en campagne, installer de nombreuses ruches en ville est alors apparue comme une pratique particulièrement vertueuse : préserver la biodiversité tout en produisant du miel de qualité. La mise à disposition des toits des villes répond par ailleurs aux besoins des apiculteurs en quête de surface pour installer leurs essaims. La ville deviendrait alors le refuge de ces abeilles qui y trouveraient un environnement plus favorable à leur développement qu’en zone rurale.

Malheureusement ce que l’on désigne comme une solution miracle pour les abeilles n’est en réalité pas si satisfaisante.

Pourquoi la multiplication des ruches en ville pose problème

L’abeille domestique, celle qui vit dans les ruches et qui permet d’obtenir du miel, se nomme Apis mellifera ou simplement abeille européenne. C’est un animal social organisé en castes (la reine, les ouvrières, les mâles dits « faux-bourdons ») dont les colonies peuvent rassembler plusieurs dizaines de milliers d’individus. Sous l’appellation Apis mellifera se cachent en fait 28 sous-espèces d’abeilles correspondant à des caractéristiques physiques et géographiques différentes.

L’abeille domestique est la plus connue, pourtant la très grande majorité des espèces d’abeilles sont sauvages. Et parmi ces espèces, la plupart sont des abeilles solitaires et ne vivent donc pas au sein de colonies. Elles font partie d’un groupe plus large que l’on appelle pollinisateurs sauvages qui compte également les bourdons, les mouches syrphes, les papillons, les coléoptères, etc. Ce sont bien ces espèces qui assurent la plus grande part du travail de reproduction des plantes et donc de nos besoins alimentaires, puisque 80% des plantes à fleurs dépendent des pollinisateurs sauvages.

Le constat est le même pour tous les pollinisateurs sauvages : les pratiques agricoles actuelles sont néfastes pour ces populations dont les taux de mortalité ne cessent d’augmenter. L’abeille est devenue le symbole du déclin des pollinisateurs, mais c’est bien tout un groupe d’espèces très diverses qui est menacé et qui dépasse largement le cas de l’abeille domestique.

Aperçu des pollinisateurs sauvages : abeille solitaire, syrphe, papillon

Alors que se passe-t-il lorsque l’on assiste à une très forte concentration de ruches d’abeilles domestiques, comme cela devient le cas dans nos villes ? Dans un contexte urbain où les ressources de nourriture sont limitées pour les pollinisateurs, les abeilles domestiques en grand nombre finissent par représenter une concurrence trop importante pour les pollinisateurs sauvages. Lorsque plusieurs ruches sont installées au sein d’un petit périmètre, cela revient à interdire l’accès aux autres pollinisateurs et à rendre encore plus difficile leur survie et leur reproduction.

Cette question donne lieu à de vifs débats au sein de la communauté scientifique, mais de plus en plus d’appels à vigilance se font entendre pour que l’on arrête de multiplier les installations de ruches sans réfléchir à cette donnée ou assurer un suivi cohérent de répartition dans l’espace urbain. Il y a un travail de pédagogie et de sensibilisation à mener avec chaque entreprise, chaque structure souhaitant posséder ses ruches car pour contribuer véritablement à la lutte contre le déclin des pollinisateurs sauvages, il existe d’autres moyens plus viables.

Si je veux agir en faveur des pollinisateurs sauvages, quelles sont mes options ?

Première option : se mettre à l’osmiculture

Nichoir à abeilles sauvages

L’osmiculture désigne une technique d’élevage d’abeilles solitaires (en particulier des Osmies, dites « abeilles maçonnes »). Il s’agit de mettre à disposition de ces pollinisateurs un environnement de nidification optimal qui leur permettra de se reproduire et d’offrir à leurs progénitures de bonnes conditions pour grandir. Vous pouvez pour cela fabriquer ou installer un nichoir à abeilles sur une façade orientée vers l’Est ou le Sud-Est et observer leurs allers et venues au fil des saisons dans ces petits tunnels. Alors bien sûr, impossible de produire du miel avec l’osmiculture, mais vous donnerez un coup de pouce à ces abeilles solitaires qui en ont bien besoin.

Deuxième option : l’hôtel à insectes comme projet collectif

Hôtel à insectes

Pour motiver un groupe d’usagers ou les salariés d’une entreprise autour d’un projet environnemental, rien de tel que la construction d’un hôtel à insectes. Basé sur le même principe que l’osmiculture, l’hôtel à insectes permet d’accueillir diverses espèces de pollinisateurs sauvages au sein d’un même dispositif : abeilles, bourdons, carabes, chrysopes…  Esthétique et pouvant s’accompagner d’un panneau pédagogique, l’hôtel à insectes se construit en quelques heures et est une source inépuisable d’observation lorsqu’il est occupé par les pollinisateurs. Pour une fabrication guidée, on peut s’aider de nombreux supports comme celui mis en ligne par Terre Vivante.

Troisième option : apporter sa contribution aux sciences participatives

Le dispositif SPIPOLL peut aussi se faire en groupe

Il est aujourd’hui possible d’aider les scientifiques du Muséum National d’Histoire Naturelle à suivre les populations d’invertébrés : les dispositifs de sciences participatives invitent les citoyens à faire des relevés d’observation de la faune et à les recenser en ligne au sein d’une vaste base de données ensuite gérée et analysée par la communauté scientifique. Et ça tombe bien, l’un de ces programmes est spécifiquement désigné pour suivre les pollinisateurs sauvages : il s’agit de SPIPOLL. Le principe est simple, il suffit de choisir une plante en fleurs (sur son balcon, dans un parc, sur son lieu de travail…) et de prendre en photo tous les insectes se posant sur cette espèce. Une fois chez vous, vous entrez vos données et publiez vos photos sur la base SPIPOLL et voilà, votre contribution est faite ! Cet exercice se renouvelle à intervalles réguliers pour permettre d’avoir des données fiables et évolutives.

Adopter des comportements qui favorisent la biodiversité est parfois plus complexe qu’il n’y paraît. C’est surtout le cas en ville où la surface disponible et les ressources naturelles sont limitées, c’est pourquoi il est indispensable d’avoir une vision holistique des mécanismes permettant à cet écosystème si particulier de fonctionner au mieux. La véritable réponse au déclin des populations de pollinisateurs sauvages ne se trouve pourtant pas là, la priorité reste de renoncer à l’usage des produits néfastes à la biodiversité dans les espaces agricoles. Alors une dernière manière d’agir en faveur des abeilles et des pollinisateurs sauvages en tant que consommateurs passe comme bien souvent par l’assiette, en allant dans le sens d’une agriculture biologique et diversifiée.

Quels avenirs possibles pour l’agriculture urbaine dans le Grand Paris ?

Wilfrid Duval, urbaniste de formation qui se définit aujourd’hui comme vidéaste urbain, réalise de courts documentaires qui abordent diverses problématiques liées aux villes, en particulier dans le cadre de l’aménagement du Grand Paris. Ce projet de « nouvelle métropole » a pour vocation de créer du lien entre Paris et ses banlieues, d’apporter une cohérence entre les territoires franciliens et de devenir un pôle de compétitivité économique.

Le documentaire « Nourrir une métropole » réalisé en 2016 présente en une vingtaine de minutes les enjeux majeurs du développement de l’agriculture urbaine en région parisienne dans les années à venir et les questions politiques, économiques, sociales, alimentaires, voire culturelles que cette tendance entraîne.

Retour aux sources maraîchères de l’Ile-de-France

Autrefois vaste patrimoine maraîcher, l’Ile-de-France consacre aujourd’hui la grande majorité de ses terres agricoles aux monocultures de céréales, de colza et de betteraves. Une production qui permet en partie d’alimenter les Franciliens mais surtout destinée à l’export. Quelques maraîchers trouvent encore leur place sur le territoire notamment grâce à une clientèle « locavore » qui s’approvisionne en vente directe et via les paniers proposés par des Amap (Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne). A l’exception de ce microcosme, le profil agricole du territoire ne permet pas au consommateur de la région parisienne de s’alimenter en circuits courts pour ses fruits et légumes frais.

Le maraîchage en Ile-de-France a-t-il encore un avenir ?

Dans le cadre de la construction du Grand Paris, les acteurs de la métropole comptent donc remettre les enjeux alimentaires au cœur des discussions en promouvant l’agriculture urbaine : au lieu d’importer les produits dont les habitants ont besoin, on les produit directement en centres-villes. Ce plan répond a priori au besoin d’autonomisation alimentaire des villes (le film rappelle que si Paris n’était plus en mesure d’importer des denrées alimentaires, les habitants ne pourraient pas se nourrir au-delà de 3 jours) et à la demande croissante des consommateurs de pouvoir s’approvisionner en circuits courts avec un impact environnemental et économique moindre.

Mais l’agriculture urbaine peut-elle et doit-elle réellement répondre à ces enjeux ?

Agricultures urbaines « low tech » et « high tech » : l’heure du choix

Secteur en pleine effervescence, l’agriculture urbaine regroupe de nombreux acteurs aux caractéristiques et aux priorités différentes. Le documentaire montre deux mouvements distincts au sein de la même appellation d’agriculture urbaine.

Il y a d’abord un mouvement citoyen de retour à la terre qui consiste à se réapproprier les espaces urbains délaissés (friches, pieds d’arbres, toitures, etc.) pour y créer des potagers participatifs. Jardins partagés, familiaux, permis de végétaliser : tous relèvent de cette agriculture urbaine que l’on qualifie de « low tech ». Les acteurs de ce pan de l’agriculture urbaine sont bien sûr les citadins mais également les collectivités qui mettent une partie de leur patrimoine foncier à disposition pour la réalisation de ces projets. C’est essentiellement de ce type d’agriculture urbaine dont il est question dans les articles de La Ville Pousse pour ses multiples vertus directes et indirectes : revalorisation des sols, sensibilisation des citoyens aux enjeux environnementaux, bénéfices pédagogiques, solidarité entre voisins, etc.

L’agriculture urbaine « high tech » regroupe de son côté des acteurs économiques : entreprises, start-ups… Il s’agit pour beaucoup de projets dits hors sol (sans contact direct avec la terre), d’aquaponie, d’hydroponie, de tours maraîchères comme on peut en apercevoir dans le film. Les objectifs de cette agriculture urbaine sont d’abord productifs et financiers : il s’agit de cultiver fruits et légumes en grande quantité en ville, à proximité des acheteurs. On est bien dans le cadre de circuits courts, puisque la distance entre le producteur et le consommateur est réduite à son minimum. Mais comme le montre le documentaire lors de l’interview d’Antoine Lagneau, coordinateur de l’Observatoire de l’Agriculture Urbaine de Natureparif, le modèle de l’agriculture urbaine « high tech » pose problème pour plusieurs raisons. En ne respectant pas la saisonnalité des produits et en déconnectant la production agricole des sols, ce mouvement ne participe pas à la sensibilisation des citadins à la nécessité de repenser notre alimentation et de la réadapter aux capacités de production des agriculteurs français. Le message véhiculé par l’agriculture urbaine « high tech » peut se lire ainsi : puisque nous sommes en capacité de produire fruits et légumes toute l’année en ville à l’aide de nouvelles technologies, nous pouvons désormais nous passer des surfaces agricoles rurales. Ce postulat contribue à justifier l’artificialisation des sols en périphérie des villes par le grignotage progressif des parcelles agricoles, qui détruit à la fois les ressources naturelles et les vies professionnelles des agriculteurs.

Un exemple d’agriculture urbaine « high tech » : les fraises cultivées par la start-up Agricool dans un conteneur en plein Paris

Ce que le film « Nourrir une métropole » montre très bien, c’est que ces mouvements d’agriculture urbaine véhiculent des valeurs si différentes qu’il est nécessaire de faire un choix entre ces deux modèles « low tech » et « high tech ». Ce choix relève en grande partie de la décision politique : les élus locaux privilégient un mode de pensée plutôt qu’un autre dans le cadre de leur politique d’aménagement du territoire et lors des appels à projets. Le concours Inventons la métropole, dont les résultats ont été dévoilés il y a quelques semaines, en est un exemple : les collectivités du Grand Paris ont fait un appel à candidatures pour repenser des lieux de leurs territoires (gares, friches, etc.). L’agriculture urbaine faisant partie du cahier des charges des candidats, il est intéressant de se pencher sur les projets privilégiés par les collectivités, certains plutôt orientés « low tech », d’autres résolument « high tech ».

Quels choix pour le citadin ?

Enfin, le documentaire met en lumière un dilemme particulièrement complexe : celui de l’acheteur. Nombreux sont les citadins du Grand Paris qui souhaitent aujourd’hui s’alimenter et consommer au mieux. Alors que choisir ? S’approvisionner en Amap : c’est une excellente option pour encourager les circuits courts, encore faut-il pouvoir trouver une petite place sur les listes d’attente franciliennes. Mais les produits des Amap sont très rarement issus de l’agriculture biologique. Faire ses courses en supermarché Bio alors ? Une bonne solution pour sa santé, mais les produits des grandes enseignes Bio proviennent très souvent de pays lointains, particulièrement si l’on est amateur de produits exotiques (bananes, avocats, chocolat, café…). Il existe trop peu de solutions pour celles et ceux qui souhaitent à la fois réduire leur impact environnemental et préserver leur santé.

Les chiffres du GAB IDF

Pour le Groupement des agriculteurs Bio d’Ile-de-France (GAB IDF), la volonté des agriculteurs est bien là : en 2015 et 2016, on compte 52 nouvelles exploitations en Bio sur le territoire francilien, soit près de 4 000 hectares. Conscients de la demande du côté des consommateurs, les agriculteurs d’Ile-de-France souhaitent être encouragés à l’installation ou la conversion de leurs cultures en Bio. Mais les actes ne suivent pas les discours politiques, à l’image de la récente décision du gouvernement de supprimer le financement d’État de l’aide à la conversion en Bio et l’annonce d’un objectif de développement de l’agriculture biologique inférieur à la dynamique actuelle du marché. Pour réconcilier les enjeux des producteurs et des consommateurs dans le Grand Paris, il devient pourtant indispensable de redonner de la valeur aux sols et aux ressources naturelles dont nous disposons.

Si l’agriculture urbaine est un outil formidable à la portée des citoyens pour se réapproprier des espaces vacants en villes et s’éveiller aux enjeux alimentaires, environnementaux et sociaux d’aujourd’hui, il faut donc veiller à ce que son pendant commercial ne mette en péril les véritables approvisionneurs du Grand Paris.

Le film de Wilfrid Duval permettra à chacun de se faire son avis sur la question !

Des toitures végétalisées pour réguler l’effet d’îlot de chaleur urbain

Chaque année voit maintenant son lot de records de températures, en particulier dans les villes où les citadins subissent l’effet d’îlot de chaleur urbain (ICU). Les activités humaines (usines, réseaux de chaleur, véhicules…) et les surfaces bétonnées et goudronnées sont responsables de cet écart subi entre villes et campagnes, pouvant aller de 2°C à 7°C, voire 10°C en période caniculaire. Au-delà de l’inconfort de telles températures pour les citadins, l’ICU est responsable de l’aggravation de phénomènes de pollutions atmosphériques par la création de smogs et la concentration de particules au-dessus de la ville. De plus, le réchauffement climatique global renforce les risques sanitaires liés aux canicules en milieu urbain et l’ICU est à ce titre aujourd’hui considéré comme un facteur aggravant de la surmortalité des personnes vulnérables lors des fortes chaleurs estivales.

Écarts de températures liés à l’effet d’ICU en Île-de-France

Végétaliser la ville pour la rafraîchir

L’une des solutions avancées pour réguler cette conséquence de l’urbanisation est de permettre à la végétation de se refaire une place en ville pour assurer ses fonctions d’évapotranspiration. En effet, lors de la photosynthèse, les végétaux transforment l’eau liquide prélevée dans le sol en vapeur d’eau qui se diffuse ensuite dans l’air ambiant et contribue à le rafraîchir. Par ailleurs, les zones d’ombre offertes par les arbres, surtout si leur emprise est importante, permet de conserver des espaces plus frais au cœur de l’agglomération urbaine. Pour contribuer à lutter contre l’effet d’ICU les villes doivent donc être davantage végétalisées non seulement par l’aménagement d’espaces verts, mais également en multipliant les arbres d’alignement.

Evapotranspiration et ombre, les deux vertus de la végétalisation
Source : APUR 2012

Mais comment faire lorsque le foncier n’est plus disponible ? Les villes qui subissent le plus l’effet d’ICU sont justement celles qui manquent de parcelles à même d’accueillir ces espaces verts dont la surface pourrait avoir un véritable impact sur les températures. Végétaliser les toitures, ces espaces sans usage présents partout dans la ville, devient alors la meilleure alternative pour réduire l’effet d’ICU.

Investir les toitures, de l’extensif à l’intensif

De nombreux acteurs de la ville (collectivités, entreprises, écoles, etc.) se sont déjà investis dans la végétalisation de toitures. Il en existe trois types, différentiés essentiellement selon l’épaisseur de leur substrat :

Structure d’une toiture végétalisée
Source : Natureparif 2011

  • Les toitures extensives (3 à 12 cm de substrat), composées exclusivement de sédums, c’est-à-dire des succulentes rampantes qui nécessitent très peu d’entretien
  • Les toitures semi-intensives (12 à 30 cm de substrat), dont l’épaisseur permet d’intégrer graminées et vivaces
  • Les toitures intensives (>30 cm de substrat), où les arbustes et les arbres trouvent même leur place

Les toitures extensives ont un impact relativement pauvre par rapport aux toitures intensives ou semi-intensives. Si une petite épaisseur de substrat permet d’améliorer nettement l’isolation thermique du bâtiment et de protéger la toiture, elle ne contribue pas significativement au développement de la biodiversité dans la ville et à la rétention des eaux pluviales. Autant de facteurs à prendre en compte lorsque l’on cherche à diminuer l’effet d’ICU et à réhabiliter un écosystème urbain qui subit les effets du réchauffement climatique.

Trois types de toitures (de g. à d. : extensive, semi-intensive, intensive)

Plus chères et demandeuses d’entretien, les toitures semi-intensives et intensives sont donc les seules véritables solutions à envisager pour réguler l’effet d’ICU. Pour être réellement efficace, la végétalisation de la ville doit non seulement être faite sur de grandes surfaces mais également en adoptant des substrats adéquats. Aménager des jardins participatifs en toiture peut être une décision adoptée par les municipalités (comme évoqué lors d’un précédent article), les bailleurs ou encore les entreprises pour apporter de l’usage à ces lieux et assurer leur entretien.

Pour impliquer les usagers, faites-les marcher !

Soucieuses de faire participer les citoyens aux projets d’aménagement qu’elles mettent en place, les collectivités ont de plus en plus recours à la concertation publique. Une méthode qui sollicite les usagers pour décider des grandes orientations du projet, mais qui peine encore à faire venir le plus grand nombre. Une solution se profile : la balade urbaine collective. Mais avant d’entrer dans le vif du sujet, un petit point sur ce qu’est la démarche de concertation et les difficultés qu’elle rencontre.

La concertation, un moyen d’impliquer les usagers dans la fabrique des projets

Lorsqu’une collectivité souhaite mettre en place un projet d’aménagement, il existe plusieurs façons d’interagir avec les usagers de l’espace public concerné. La liste suivante n’est pas exhaustive mais elle permet de comprendre la spécificité de la concertation publique parmi les options les plus couramment utilisées par les décideurs :

  • L’information : On ne peut dans ce cas pas parler de participation, puisque la collectivité ne fait que communiquer des renseignements au public à travers différents médias (site internet, presse, affichages, réunions publiques, etc.). La décision est déjà prise, les modalités sont arrêtées, les citoyens ont simplement accès aux détails du projet avant sa réalisation.

Ex. : « Nous allons végétaliser votre rue, voici les aménagements prévus. »

  • La consultation : Les décideurs cherchent dans ce cas à connaître l’opinion du public. La consultation peut avoir lieu à n’importe quel stade d’avancement du projet et les avis recueillis ne sont pas nécessairement pris en compte pour décider des orientations de l’aménagement.

Ex. : « Nous allons végétaliser votre rue, qu’en pensez-vous ? »

  • La concertation : Dans l’optique de co-construire le projet avec les citoyens, la collectivité met en place un dispositif permettant de recueillir, confronter et prendre en compte les avis des participants pour décider des orientations à venir. C’est en amont du projet que peuvent être mis en place réunions et ateliers qui permettent de débattre des modalités de l’aménagement : il s’agit d’un diagnostic partagé.

Ex. : « Nous envisageons de végétaliser votre rue, aidez-nous en déterminer les modalités. »

La concertation est un outil très utile pour les décideurs, puisqu’elle permet de légitimer le projet auprès du public : inviter les usagers à prendre part aux décisions permet de concevoir le projet en adéquation avec leurs attentes et donc de limiter le risque de contestations une fois l’aménagement réalisé. C’est aussi une belle preuve de transparence pour des institutions souvent qualifées d’opaques. Lorsqu’elle naît d’un véritable souci de prise en compte des suggestions des citoyens et qu’elle se fait suffisamment en amont du projet pour pouvoir le repenser et l’adapter, la concertation fait ses preuves : de nombreuses collectivités ont adopté la démarche et la réinvente à l’aide de nouveaux outils.

Un objectif difficile à mettre en pratique

La concertation consiste le plus souvent à solliciter les usagers pour participer à des réunions publiques et ateliers organisés par la mairie : débats, groupes de travail, cartographie participative… Les collectivités disposent de nombreuses méthodes pour recueillir les idées des citoyens. Selon l’échéance et l’ampleur du projet, les rendez-vous peuvent s’étaler sur plusieurs mois, permettant ainsi à tous les citoyens de participer… en théorie !

La première difficulté est liée ameeting-business-936059_1920u manque de disponibilité d’une grande partie des usagers. Les concertations publiques mobilisent surtout des personnes retraitées et des citoyens déjà engagés dans la vie de quartier. Il est difficile d’impliquer les autres usagers et de les convaincre de se rendre en mairie plusieurs heures, souvent en pleine semaine. Des outils numériques ont été développés pour surmonter ce problème : la Mairie de Paris permet de voter pour les projets et faire ses propositions en ligne, dans le cadre du Budget Participatif annuel par exemple. Mais l’utilisation du numérique est elle aussi discriminante, puisqu’il existe également une disparité sociale d’accès au web et à tous ses outils.

Le second enjeu est finalement le même que dans les salles de classe : tout le monde ne lève pas la main pour donner son avis, et c’est souvent les mêmes personnes qui osent s’exprimer. Le cadre de la réunion publique ou même des ateliers met à l’épreuve les usagers, soucieux d’être intelligibles par les autres participants (y compris les décideurs du projet) et pertinents. Pour certains, le cadre même de la réunion peut être une mise à l’épreuve : comment prendre la parole quand on se sent illégitime ?

Autre problème, et non des moindres : le rôle du citoyen lors des réunions publiques consiste souvent à « répondre » plutôt qu’à « proposer » : alors que la concertation a pour objectif de construire un projet à partir des idées des habitants, ceux-ci se retrouvent surtout dans une situation où ils assistent à l’exposé du projet et y réagissent par des questions ou des contre-propositions. Un frein à la créativité qui est tout de même réduit lorsque sont organisés des groupes de travail en complément des réunions publiques plénières.

Discuter en marchant, la solution ?

La balade urbaine est une méthode déjà employée par plusieurs collectivités engagées dans une démarche de concertation. Elle consiste à se donner une heure de rendez-vous pour parcourir collectivement le lieu du futur projet et ses alentours, et permet à chacun d’évoquer les problèmes rencontrés sur l’espace public et les solutions à imaginer. Le tracé de l’itinéraire est le plus souvent décidé en avance par l’équipe chargée d’animer la balade, qui fournit aussi des questionnaires aux habitants. Ce qui implique un long travail de recueil et d’analyse de tout ce qui s’est dit pendant la marche : la balade urbaine n’est pas forcément la méthode de concertation la plus économe en termes de moyens humains.

ilink-associationMais elle est la plus intéressante pour confronter les points de vue ! D’une part, il n’existe plus le frein discriminant de la réunion où il faut prendre la parole devant des dizaines de personnes et discuter des grandes orientations du projet. Lors de la balade, les interventions sont plus courtes et concrètes : on parle de ce qu’il y a ici et maintenant, et de ce que l’on souhaite y voir à l’avenir. D’autre part, tous les habitants du quartier ne seront peut-être pas au rendez-vous, mais il est plus facile de mobiliser des usagers pour une balade d’une heure que pour une réunion formelle en mairie.

La balade urbaine est aussi le lieu où se croisent les savoirs : ceux des élus et des techniciens avec ceux des citoyens, mais aussi entre les différents usagers de l’espace public. Pour reprendre l’exemple de la rue végétalisée, un automobiliste n’aura pas les mêmes suggestions qu’un cycliste où un parent qui doit pouvoir circuler avec une poussette. En se rendant sur le lieu du projet, on peut confronter les points de vue en visualisant les problèmes et leurs résolutions.

Et dans les faits, ça donne quoi ? Exemple de la rue Kléber à Bordeaux

En 2011, dans le cadre de son vaste projet d’aménagement (Re)Centres, la Ville de Bordeaux a mis en place un dispositif de concertation publique pour repenser une rue souvent encombrée par les voitures : la rue Kléber. La collectivité a organisé de nombreux ateliers, mais également une balade urbaine qui a permis de faire ressortir les usages de la rue et les problématiques à traiter dans le cadre de son réaménagement :

« (…) les habitants racontent : ici un carrefour dangereux, là un ancien café qu’il faudrait pouvoir rouvrir, plus loin une maison en ruine que l’on devrait pouvoir habiter ou un trottoir trop haut pour les poussettes. » (extrait du Livret (Re)Centres)

Avant/après du projet de la rue Kléber
L’avant/après du projet de la rue Kléber

Cette balade urbaine a permis de mettre le doigt sur ce qui était important pour les habitants dans le cadre de ce réaménagement : réinventer une rue à la circulation plus douce et qui laisse de la place à une vie de quartier. C’est en tenant compte de ces désirs que les architectes-urbanistes ont conçu une rue-jardin : la chaussée au tracé sinueux limite la vitesse de circulation des voitures et libère des espaces en pied d’immeuble consacrés au jardinage et à la convivialité.
 
 Un projet inspirant pour les collectivités en recherche de modes de concertation innovants !
Crédits : association îlink, Ville de Bordeaux

La métamorphose des villes sans pesticides

Au 1er janvier 2017, les collectivités ne pourront plus utiliser de produits phytosanitaires (aussi appelés pesticides) pour entretenir les espaces verts et la voirie : c’est l’heure du « zéro phyto ». Une vraie révolution des pratiques pour les nombreuses communes qui en ont un usage quotidien dans le cadre de l’entretien de l’espace public. Pourquoi a-t-on besoin d’une telle réglementation, et quelles sont les conséquences de cette mesure pour les habitants ?

Une nouvelle réglementation nécessaire et attendue

La France est le premier pays consommateur de pesticides en Europe et le troisième au niveau mondial, avec près de 80 000 tonnes utilisées par an. Actuellement, c’est plus d’un tiers de la surface du territoire français qui est soumis à un traitement phytosanitaire ! 90% de cette consommation est à incomber au secteur agricole : les produits permettant de lutter contre les nuisibles de l’agriculture (champignons, insectes, “mauvaises herbes”, etc.) se sont rendus indispensables dès leur arrivée sur le marché dans les années 1960. Combinés au bond technologique qu’a connu le secteur à cette période, les produits phytosanitaires ont permis de doubler la productivité des surfaces agricoles. On est alors entré dans un modèle productiviste, basé sur le rendement des parcelles cultivées. Et en matière de maximisation de la productivité des cultures, la France a su se distinguer puisqu’elle est aujourd’hui le premier producteur agricole européen.

Malheureusement, l’utilisation massive de ces produits a des conséquences écologiques graves. Pollution des eaux, de l’air, des sols, mortalité des pollinisateurs, perturbation des modes de reproduction des invertébrés… Et les impacts sur la santé humaine sont également connus : l’OMS considère que 20 000 à 200 000 décès annuels sont dus aux pesticides. Les aliments, l’eau et l’exposition directe sont autant de vecteurs par lesquels nous pouvons être contaminés.

Face à ce constat et aux mises en garde répétées des institutions de santé et de protection de l’environnement, les États ont décidé de prendre des mesures : en France, la réglementation s’est élaborée depuis 2008 avec la mise en place du Plan Ecophyto. Ayant pour objectifs de réduire la consommation nationale de produits phytosanitaires de moitié en dix ans, ce programme a permis de lancer un certain nombre d’expérimentations qui ont montré que, oui, il est possible de produire et de vivre sans pesticides. Et si une grande partie des mesures adoptées visent le secteur agricole, les villes sont elles aussi concernées. La loi Labbé du 6 février 2014 et la loi relative à la transition énergétique du 22 juillet 2015 ont changé la donne : désormais, les communes ont obligation d’adopter une gestion sans pesticides. Ce qui signifie que les équipes techniques en charge de l’entretien de l’espace public doivent repenser et réadapter leurs pratiques et leurs savoir-faire : fini l’épandage de produits, maintenant on défriche à la main et on laisse pousser la végétation spontanée pour des villes plus vertes, et surtout plus saines. Mais cette mesure change radicalement le paysage urbain, dont les massifs fournis et pavés enherbés perturbent les habitants et leur représentation de ce qu’est une ville propre et entretenue.

Nouveaux paysages urbains et acceptabilité sociale

Comme le mentionne un récent article paru dans la revue Sciences & Avenir, l’interdiction d’utiliser des pesticides pour les communes relève d’une révolution technique, mais aussi culturelle. Partout on entend les plaintes des citadins concernant ces rues devenues « sales », « mal entretenues » ou « négligées ». En effet, il peut être difficile pour les habitants de voir leurs quartiers et leurs villes changer d’aspect en quelques mois. Les traditions classiques de jardinage et d’aménagement paysagers sont ancrées dans les perceptions esthétiques des habitants, qui se trouvent souvent désemparés face à ces nouveaux paysages urbains.

Prenons l’exemple d’une rue de centre-ville (ici à Châtenay-Malabry, avant la mise en place du « zéro phyto ») : 

Entre le trottoir et la chaussée, il est commun d’avoir ce type de massifs de fleurs. Ici, ils sont assez homogènes et sans « mauvaises herbes ». Les pieds d’arbres sont eux aussi vides de petites pousses, et on ne voit pas un brin d’herbe sur la chaussée non plus. Les espaces végétaux sont très bien délimités : ils sont créés et aménagés par la main de l’homme uniquement.

Dans les villes sans pesticides en revanche,  la végétation spontanée reprend ses droits et l’espace public s’en trouve radicalement modifié :

On voit bien que les massifs et les pieds d’arbres sont plus divers, accueillant fleurs, arbustes et adventices. Les pavés et les grilles d’évacuation des eaux de pluie sont eux aussi enherbés. La végétation n’est pas uniquement présente là où on l’a plantée et choisie : elle s’installe un peu partout, rendant plus floue la limite entre espaces verts et espaces dédiés à la circulation. Au-delà de l’aspect esthétique, c’est bien un changement culturel qui s’opère pour les habitants, qui acceptent parfois difficilement l’intrusion du végétal dans leurs lieux de vie et de passage.

Sensibiliser par l’action : quelques pistes

Lorsqu’elles mettent en place leur plan « zéro phyto », les collectivités veillent à ce que les habitants en soient informés. Affiches, articles dans la presse locale, communiqués… Mais pour réellement sensibiliser les citadins à la nécessité d’interdire les pesticides, je crois qu’il est nécessaire de leur montrer que cette réglementation peut avoir des impacts positifs sur leur mode de vie. Et pour cela, quoi de mieux que de leur offrir des moyens d’agir et de participer ?

Une étude publiée en février dernier par les laboratoires Profilomic réalisée à partir de l’analyse des ruches de l’Opéra Garnier a montré que le miel produit dans des villes sans pesticides est de meilleure composition que le miel de consommation classique. Aucune trace d’hydrocarbures ou de métaux lourds, et seuls 2 polluants en très faibles quantités sont retrouvés dans le miel parisien, contre 35 polluants différents (en moyenne 5 par pot) et de nombreuses substances antibiotiques du côté des miels de grande consommation, selon une enquête de 60 millions de consommateurs. On entend beaucoup parler du développement des ruches en ville, installées par des entreprises souhaitant verdir leur image, des écoles, des collectivités ou même des habitants. Et si cette tendance était justement l’occasion de sensibiliser les citadins aux bénéfices de la ville sans pesticides ? Proposer la vente directe de miel de ville à un coût raisonnable ou accompagner l’installation de ruches d’entreprise par un programme de sensibilisation des salariés sont autant de moyens d’agir pour l’avancée des mentalités. Des ruchers pédagogiques existent déjà pour éveiller les enfants au rôle écologique essentiel des abeilles, mais compléter ce travail par une démarche s’adressant aux parents souvent soucieux de la qualité de leur alimentation quotidienne est une opportunité à saisir.

Encourager les citadins à se rassembler au sein de programmes de sciences participatives est un autre moyen de les sensibiliser aux bénéfices de la végétalisation spontanée dans les villes. Sauvages de ma Rue est à la fois un projet pédagogique et de recherche élaboré par Tela Botanica et le Muséum National d’Histoire Naturelle. Il est spécifiquement adapté au contexte urbain et s’adresse aux citadins qui souhaitent mieux connaître les espèces végétales présentes dans leurs quartiers. Le principe est simple : grâce à une application smartphone ou un guide papier, chacun identifie les plantes présentes autour de son lieu de vie et alimente les données cartographiées disponibles en ligne. Associant institutions scientifiques, grand public, scolaires et collectivités, ce programme offre de vraies possibilités d’échanges entre les décideurs et les habitants. Et comme il s’agit d’un outil ludique, il permet de sensibiliser plus facilement les participants aux enjeux du « zéro phyto ». Car sans pesticides, on trouve toujours plus de plantes à observer !

Si le « zéro phyto » obligatoire pour toutes les communes présente des difficultés techniques et d’acceptabilité sociale, il faut aussi laisser le temps se faire et les mentalités évoluer. Surtout qu’au 1er janvier 2019, ce sera au tour des particuliers : interdiction d’utiliser ou de détenir des produits phytosanitaires ! Pour les jardiniers amateurs qui ont l’habitude de passer un peu de Roundup, il sera alors indispensable d’apprendre les bases du jardinage écologique et de s’habituer à la métamorphose de leurs jardins.

Plus de nature en ville : à quoi ça sert ?

On parle de plus en plus des villes vertes et de leur importance face aux défis environnementaux, sociaux et de santé publique, mais sans jamais en décrire précisément les enjeux. Alors je pense qu’un petit point sur les bénéfices du végétal en ville s’impose : à quoi sert d’aménager plus d’espaces de nature en ville ?

Pour la biodiversité

En Europe, plus de 72% de la population vit en ville. La biodiversité est la première à en pâtir, puisque l’étalement urbain provoque une destruction rapide et massive des ressources naturelles. Il faut donc trouver des moyens pour restaurer la biodiversité, ce qui se fait notamment dans les zones rurales par la protection des espèces vulnérables et des milieux naturels. Mais la ville a elle aussi son rôle à jouer ! Permettre aux espèces de circuler et de s’implanter dans les milieux urbains, c’est déjà participer à la restauration globale de la biodiversité.

Prenons un exemple dont on a beaucoup entendu parler ces dernières années : l’abeille sauvage. 90% des abeilles ne produisent pas de miel, elles vivent en solitaires et sont des pollinisatrices indispensables à l’équilibre des écosystèmes. On observe leur déclin impressionnant depuis les années 1980, à cause de la destruction de leurs habitats et à l’utilisation des pesticides néonicotinoïdes (là-dessus en particulier, voir ce petit article paru dans le Monde il y a quelques mois). Au-delà de la nouvelle législation concernant ces produits, réduire la mortalité des abeilles sauvages passe par la création de conditions favorables à leur accueil en ville. Pour les aider à circuler et limiter les conséquences de la fragmentation de leurs habitats, on aménage ce qu’on appelle des corridors écologiques qui leur permettront de traverser les zones urbaines.

Mettons-nous à la place de l’abeille : a priori, la ville est pour elle un environnement minéral et hostile, où les ressources se font rares. À Londres par exemple :

Londres

Mais si on regarde bien, on se rend compte que notre abeille solitaire peut aller d’un point vert à un autre par quelques sauts de puce ! Ce qui lui permet de traverser la ville au lieu de la contourner, et participer à la pollinisation des jolis jardins londoniens. Et c’est le cas pour une bonne partie de la faune, puisque 50% des espèces mobiles sont déjà présentes dans nos villes (oiseaux, insectes volants, etc.).

Londres corridors écologiques

Ces corridors écologiques qui permettent aux espèces de se déplacer dans la ville et de faire la jonction ville-campagne sont appelées Trames Vertes Urbaines. Elles sont aujourd’hui un outil indispensable à l’échelle nationale pour restaurer la biodiversité et repenser nos plans d’aménagement du territoire.

Pour notre santé

Si les abeilles, les rats, les chauves-souris, les papillons ne sont pas votre tasse de thé, peut-être que vous serez plus sensible aux bénéfices du végétal sur notre bien-être. Vous l’avez sûrement remarqué, les parcs sont les endroits les plus agréables où se réfugier en cas de grosse chaleur. C’est grâce à l’eau relâchée par la végétation dans l’atmosphère qui permet de la rafraîchir, et nous avec. Un autre service bien connu que nous rendent les espaces verts urbains est provoqué par la photosynthèse : l’air est filtré d’une partie de ses substances polluantes et particules fines, donc bien meilleur pour nos poumons.

Ce qui peut paraître plus surprenant, c’est que la présence de végétal en ville a des impacts directs sur notre santé mentale et physique. En 1984, le chercheur Roger S. Ulrich publie un article qui fera date : il montre qu’après une opération chirurgicale, les patients dont la chambre donne sur un espace vert récupèrent plus vite et souffrent de moins de complications que les autres. Depuis ce papier précurseur, de nombreuses études ont suivi. Être régulièrement au contact du végétal réduit le stress et les troubles cardio-vasculaires, respiratoires et attentionnels. Au travail, la vue d’un espace vert augmente les capacités cognitives et l’efficacité.

Les aménageurs de la ville commencent à s’emparer de ces questions pour repenser la place de la nature dans notre quotidien. Ce qui relevait jusqu’à présent de l’esthétique devient une question de santé publique et de bien-être : les immeubles de logements, de bureaux, les espaces publics comprennent de plus en plus d’espaces végétaux. Sans compter que l’aménagement des Trames Vertes Urbaines dont je parlais plus haut favorise les modes de circulation doux (piétons, vélos), qui répondent eux aussi à de grands enjeux de santé publique et d’amélioration du cadre de vie urbain.

Pour plus de cohésion sociale

C’est le positionnement que je défends par mon approche socio-environnementale : des projets écologiques oui, mais surtout s’ils contribuent à construire du lien social entre les citadins. J’ai récemment relu une publication de Val’Hor et Plante&Cité parue en 2014 et portant sur les bienfaits du végétal en ville. Si le sujet vous intéresse, je vous invite à la consulter car elle est de très bonne qualité, elle fait état de la recherche scientifique dans le domaine et synthétise un certain nombre de travaux de recherche menés ces dernières années. Mais j’ai été surprise en tombant sur ce tableau :

D’après cette synthèse, les recherches actuelles ne permettent pas de déterminer si la végétalisation des villes a un réel impact positif sur le lien social. Ce que l’étude manque de préciser, c’est que la très vaste majorité des travaux sur le sujet portent sur les espaces verts. Alors oui, les parcs urbains peuvent être des espaces de sociabilité mais de là à parler de création de lien social, c’est exagéré en effet. Ce qu’il faut observer en revanche ce sont les autres démarches de végétalisation de la ville. Je vous ai parlé dans un précédent article de l’Agrocité, cette ferme urbaine qui contribue non seulement à restaurer la biodiversité mais qui constitue un espace de sociabilité et d’apprentissage pour les habitants de Colombes. C’est la même démarche qui anime les jardins solidaires, partagés, familiaux, pédagogiques, d’entreprises… Toutes ces initiatives sont destinées à produire de la nourriture et permettre à tous de jardiner, mais elles ont aussi un objectif de rencontre entre les usagers, voire de mixité sociale dans certains quartiers. C’est d’ailleurs ce qu’on entend souvent sur le terrain : « on ne se serait jamais rencontrés en-dehors du jardin », que ce soit entre collègues ou entre voisins.

Contribuer à une meilleure harmonie sociale en apportant plus de végétal en ville, les collectivités y voient un intérêt grandissant. L’une des villes françaises les plus avancées en la matière est certainement Lyon, qui propose à ses habitants de participer à la végétalisation de l’espace public en entretenant des micro-implantations florales. Ces interstices creusés en pied d’immeubles – dont la percée dans les trottoirs est prise en charge par la municipalité – mif-lyonsont des espaces de plantation confiés aux citadins. Les habitants de la rue ou du quartier prennent en charge l’entretien de leurs micro-jardins, dans une dynamique collective qui prend toujours plus d’ampleur. On compte aujourd’hui plus de 700 micro-implantations florales à travers la ville ! Le succès de l’initiative de Lyon a transformé la ville et le cadre de vie des citadins.

D’autres exemples de d’initiatives en faveur de la biodiversité et des citadins suivront dans les prochains articles. J’espère en tout cas vous avoir convaincu du bien-fondé de la démarche !